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  • Photo du rédacteurPatricia Bourrillon

Johnny Cash et la pensée du jour

Je regarde Johnny Cash : Behind Prison Walls (1976) et je me sens soudain envahie de nostalgie d'une époque sans téléphones portables, sans ordinateurs, sans réseaux sociaux... Une époque qui me paraît d'ici, depuis 2021, plus authentique et plus joyeuse.


Johnny Cash en concert
Johnny Cash

Aujourd'hui, j'ai la sensation que nous nous sentons si seuls, si éloignés des autres et de nous-mêmes dans cette époque hyperconnectée, que nous multiplions les publications - les images, les photos de nous-mêmes, de nos familles, de nos repas, les vidéos, les réflexions, etc. - comme un appel désespéré à une réaction de l'autre.


N'importe quel autre. Car le "partage", aujourd'hui, est impersonnel. Un appel est lancé. Y répondra qui veut pourvu qu'il y ait une réponse, une réaction, un commentaire, quelque chose qui nous donne l'illusion d'interagir avec l'autre et sur laquelle nous pourrons rebondir pour remplir ce temps qui nous paraît bien vide.


A moins que nous ne cherchions que l'approbation de l'autre pour nous rassurer dans l'idée que nous appartenons bien à la société, à l'époque, que nous sommes bien conformes à ce que l'autre attend de nous...


Un partage impersonnel, donc. Des informations lâchées "à la cantonade" pour qui les verra et peu importe bien qui. Personne n'est ciblé. A moins que tout le monde le soit. On ne sait plus très bien à qui l'on s'adresse. Peut-être à soi-même, en fait. L'autre n'est qu'un réceptacle sur ces réseaux exutoires.


Sait-on d'ailleurs encore s'adresser à l'autre individuellement ? En a-t-on encore envie ? Y pense-t-on seulement ? Ne perd-on pas, dans cette multitude de publications éructées sur les réseaux sociaux, l'art de la conversation en tête à tête, les yeux dans les yeux ?


Les sites de "rencontre" connaissent le même mode de fonctionnement : la pêche. Personne n'est vraiment choisi, et c'est à celui ou celle qui mordra à l'hameçon. A moins que tout le monde le soit. On ne sait plus très bien là non plus. Peut-être cherche-t-on simplement à se rassurer sur soi, sur son apparence physique et, dans le fond et encore une fois, sur sa conformité à la société et à l'époque : si je plais, c'est que je ressemble à ce que la société attend de moi.


A trop nous perdre dans les méandres des réseaux dits sociaux, nous délaissons qui nous sommes pour devenir ce que l'on attend de nous car nous sommes devenus trop visibles, nous vivons sous les projecteurs, vulnérables au regard de l'autre auquel il vaut mieux se conformer car cela sera plus confortable, plus rassurant.


On s'oublie, donc, et on oublie l'autre dans nos publications impersonnelles qui le plongent dans un goufre de solitude et d'incertitudes.


Faisons une expérience. Si vous ne publiez rien sur Facebook pendant quelque temps, qui prend de vos nouvelles ?


Aujourd'hui, chacun attend de l'autre qu'il donne de ses nouvelles sur les réseaux sociaux. S'il ne le fait pas, il ne se rappelle pas au bon souvenir de l'autre.


On ne prend plus de nouvelles de l'autre. On attend passivement qu'il en donne sur les réseaux sociaux. Sans aucune attente, on regarde les publications, ces cris poussés pour attirer un peu d'attention, défiler.


A présent, si vous me le permettez, je retourne à Nashville un an avant ma naissance retrouver Johnny Cash et ses invités et rêver à un monde sans réseaux sociaux, un monde de personnes réellement connectées entre elles et, surtout, à elles-mêmes et à l'instant présent, à ce(ux) qui les entoure(nt) au-delà de leur téléphone portable.


Je reste disponible dans cette réalité pour prendre un verre, balader, faire de la musique... sans écran entre vous et moi pourvu que l'invitation soit personnelle.


Réapprenons à le faire.


Toute reproduction, représentation, modification, publication, adaptation, de tout ou partie des éléments du site, quel que soit le moyen ou le procédé est interdite, sauf autorisation écrite préalable de Patricia Bourrillon.

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